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Le journaliste masqué

"Nous sommes des enquêteurs, pas des procureurs"

50 nuances de journalisme…

50 nuances de journalisme…

Les journalistes sont la profession qu’on aime détester quand ils ne se critiquent pas les uns les autres. C’est à celui qui sera le plus pur, le plus ‘professionnel’, le plus rigoureux, etc. Certains devraient relire Albert Camus, vraiment. Les nouvelles de ces derniers jours nous en donnent encore la preuve.

Libé vs Russia Today

Commençons d’abord par Russia Today, la chaîne d’information en continue financée par le gouvernement russe. Outil d’influence comme peuvent l’être France 24, la BBC ou encore CCTV pour la Chine, Russia TV a – comme le dit Libération – « l’indépendance en moins ». Décidément, les donneurs de leçon sont légions. En effet, une chaîne de télévision est un objet politique, aux mains d’un pouvoir, démocratique ou non : on pense aux pays autoritaires… comme aux entreprises qui par définition ne sont pas un acteur démocratique. CQFD. Mais quel qu’il soit, l’acteur utilise en général les leviers à disposition pour communiquer à propos, selon ses objectifs, ses perceptions. On peut certes parler de ‘propagande’ mais il faut se souvenir des propos de George Orwell : « Etre journaliste, c’est imprimer quelque chose que quelqu’un d’autre ne voudrait pas voir imprimé. Tout le reste n’est que relations publiques ».

Aussi, entendre Libération s’offusquer des propos d’un ancien journaliste français de Russia Today a de quoi surprendre : « Ce n’était pas possible au niveau de l’éthique journalistique. Pas seulement parce que c’est partial, mais aussi parce qu’ils reprennent des rumeurs, des fausses infos et font des articles à base de tweets. J’ai l’impression d’y avoir vécu le pire des journalismes ». Certes, Russia Today est un outil politique très critiquable… tout comme Libé. Je renvoie ce journal à son histoire, ses dérives. De fait, qui peut se permettre de donner des leçons en termes de ligne éditoriale ? Les naïfs contre les réalistes, éternelle rengaine.

ICIJ vs Wikileaks

‘Vision de ce qu’est le journalisme’ toujours, mais cette fois entre le Consortium international de journalistes d’investigation, connu pour ses révélations avec les Panama Papers (et bien d’autres avant), et Wikileaks.

Or, cette organisation non-gouvernementale, fondée par Julian Assange, a sévèrement critiqué la manière dont l’ICIJ divulgue les informations : vérification des faits, interviews des protagonistes, etc. Or, Wikileaks, plutôt porté sur la transparence à tout crin, y voit une sorte de censure puisque l’ICIJ n’a pas divulgué tous les documents. Aussi, comme le note très justement Slate, il y a là « deux visions antagonistes de la liberté de l’information, une maximaliste, l’autre relative et soumise à des procédures traditionnelles ».

Sujet d’importance et qui vaut la peine d’être discuté. Bien plus intéressant en tout cas que la pseudo analyse portant sur la responsabilité des Etats-Unis dans l’affaire, sur le complot international anti-Poutine financé par George Soros et j’en passe…

L’article de Costas Efimeros, de The Press Project, prend de la hauteur sur ce sujet d’importance et mérite d’être lu avec attention. Selon lui, les Panama Papers pourraient signer le glas du journalisme comme nous le connaissons aujourd’hui. De quoi faire réfléchir : une nouvelle bataille entre les anciens et les modernes.

Etats-Unis vs France

Une chose fascinante dans les primaires américaines est le rôle de la presse écrite concernant les fameux endorsement ou approbation en français. Chose incongrue en France : les journaux prennent fait et cause pour un candidat, de manière argumentée et officielle. Pas seulement des grands media mais également des journaux locaux.

Le Boston Globe a détourné cette pratique en imaginant les premiers jours de Trump Président, forcément cataclysmiques. En effet, dans son éditorial, le journal précise que le candidat à la primaire républicaine est un démagogue, profondément anti-américain (tout en critiquant l’autre favori, Ted Cruz).

Tradition bien ancrée aux Etats-Unis, l’endorsement semble archaïque pour nous Français. En effet, seul le péril FN fait sortir la presse de ses gonds, au risque de se faire taxer de ‘gauchiste’. En outre, il existe une certaine hypocrisie car les journaux sont incités à traiter des sujets de manière partiale, même ceux politiques, ce qui n’est fait que rarement. Finalement, Libé soutiendra le candidat de la gauche et le Figaro celui de la droite. De fait, la primaire américaine donne des pistes d’amélioration – ou de critiques – à la presse française, pour peu qu’on y réfléchisse. Là aussi, encore des nuances journalistiques à prendre en compte.

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